Après les remarquables
Egon Schiele, vivre et mourir et
Rimbaud l'indésirable, Xavier Coste nous revient avec un nouvel album dans lequel il tisse un polar historique porté par un graphisme épuré et envoûtant.
Paris, 1910. La scène est sortie de son lit et a envahi les rues de la capitale. Eddie et Agatha, couple d’américain séjournant à Paris, croulent sous les dettes de jeu… Agatha est contrainte de se prostituer pour leur donner une chance de rembourser ses usuriers… C’est alors qu’Eddie décide de profiter du désordre que les inondations font régner à Paris pour s’attaquer à la banque American Express sise près de l’Opéra. Leur coup, rapidement monté, nécessite d’engager des complices. Ils recrutent alors des Apaches… Mal préparée, le casse tourne mal et a police met rapidement la main su un des malfrats qui balance à tout va. Eddie et Agatha mettent les voiles vers l’Angleterre mais Eddie est rapidement reconnu, arrêté, jugé et condamné au bagne. Il ne rêve que de retrouver sa compagne et une partie du magot encore en sa possession… Mais la belle l’attendra-t-elle?
Inspiré de faits réels s’étant déroulées durant la grande crue de 1903, l’action est transposée sept années plus tard lors de la crue centennale, certes plus connues, de 1910. Plus qu’un polar, l’album est surtout le récit d’un couple à la dérive… Eddie va tenter de sortir leur couple de l’impasse où son inconséquence les a enfermé mais tout va aller de mal en pis et rarement album n’aura mieux porté son titre…
Articulé en deux parties distinctes (avant et après le casse), l’histoire nous est comptée avec pudeur et retenue par Eddie lui-même, narrateur de l’intrigue. Son incroyable destin va le faire passer de looser à braqueur de banque, bagnard et évadé… Il reprend dans les grandes lignes celui du véritable Eddie Guerin mais en laissant la fin ouverte, pleines de promesses et d’incertitudes. Les retrouvailles fracassantes de ce dernier avec Agatha en 1907 où son amante (qui a côtoyé les frères Daltons!) lui tirera dessus sont passées sous silence…
Le travail graphique réalisé par Xavier Coste est une fois encore de toute beauté. Ses pages, joliment composées, sont un régal pour les yeux et il semble avoir pris un réel plaisir à dessiner Paris devenu l’espace d’une crue semblable à Venise. Certaines cases sont rehaussées de motifs art-nouveaux, conférant à l’ensemble un aspect esthétique appréciable, d’autant que l’album en lui-même a fait l’objet d’un soin tout particulier avec ses textes embossés.
A la dérive est un album somptueux et passionnant qui s’inspire de faits réels pour tisser une fiction captivante sur un coupe à la dérive. Les dessins épurés et plein d’élégance de Xavier Coste portent joliment cette histoire écrite à la première personne.