Ayant découvert les plaisirs de la lecture avec San-Antonio, c’est presque naturellement que Michaël Sanlaville se propose d’adapter l’un des romans de Frédéric Dard… Et quoi de plus normal que ce lyonnais s’empare de
San-Antonio chez les Gones pour rendre hommage à cet auteur de polar jubilatoirement irrévérencieux et inventeur d’une langue argotique délicieusement grivoise…
Lorsque s’ouvre l’album, on retrouve Bérurier faisant classe de façon pour le moins incongrue à une bande d’écolier quelque peu déstabilisés par son attitude iconoclaste… Poker, gauloises, piquette et interrogations musclées sont au programme de cette matinée ensoleillée… Quand l’inspecteur de l’Education Nationale débarque dans la classe, connaissant les manières de Bérurier, on sait que ce représentant de l’Etat va passer un sale quart d’heure…
Si Bérurier joue les instituteurs dans cette petite école de cette paisible bourgade, c’est qu’il enquête sous couverture avec le commissaire San-Antonio sur la disparition de deux enfants et le meurtre sanglant de leur instit…
Bons mots et cadavres vont s’enchaîner sur un rythme endiablé…
Ce n’est pas la première fois que San-Antonio a les honneurs d’une adaptation en BD. Les duo Patrice Dard (fils du romancier)/ Henri Desclez et Robert Mallat,/ Henry Blanc s’y sont attelés il y a quelques décénies… Mais le fait est que d’apprendre que Michaël Sanlaville, révélé par
Hollywood Jan (aux côté de Bastien Vivès), et formidable dessinateur de
Rocher Rouge (sur un scénario d’Eric Borg) et de l’enthousiasmant
Last Man (avec Balak et Bastien Vivès) était du genre à faire friser les moustaches des amateurs de la prose irrévérencieuse et irrésistibles du romancier! Et le fait est qu’on n’est pas déçu du voyage!
Si le roman, 51ème de la série, n’est pas le plus connu des San-Antonio, on y retrouve tout ce qui fait le charme de ces polars iconoclastes : des dialogues fleuris et truculents, des personnages joyeusement barrés, des situations irrésistibles, du sexe débridé ainsi que des cadavres et des rebondissements en cascades…
Michaël Sanlaville signe un album superbe et parfaitement maîtrisé. Rehaussé par des couleurs éminemment lumineuses, son trait énergique et expressif d’inspiration manga fait une fois de plus merveille alors que son découpage dynamique et ses cadrages virtuoses confèrent à l’ensemble une fluidité appréciable… Sa formidable galerie de personnages, tous plus expressifs, plus tordus et joyeusement barrés les uns que les autres, apportent tout son sel à l’album…
Le directeur de casting a fait un formidable travail! Si San-Antonio aux allures de Delon s’avère des plus réussi, difficile de ne pas être enthousiasmé par Bérurier, inculte, grossier et dégueulasse à souhait qui colle plutôt bien à l’image qu’on s’en faisait…
On y croise en outre quelques guest stars tel le sinistre Zemmour, excellent dans son rôle d’inspecteur, Strauss-Kahn en gros porc adipeux et libidineux ou Depardieu, parfait en pharmacien alcoolique…
Le talentueux Michaël Sanlaville à qui on doit notamment l’enthousiasmant Last Man signe avec San-Antonio chez les Gones une formidable adaptation résolument moderne du roman éponyme de Frédéric Dard…
On y retrouve tout ce qui faisait les charmes du roman : personnages truculents, dialogues irrésistibles, humour mordant et intrigue tortueuse à souhait…
Porté par un dessin énergique et élégant, cette première enquête de San-Antonio et Bérurier s’avère en tous points réussie… On ne peut qu’espérer que cet opus soit le premier d’une longue série tant nous avons pris plaisir à dévorer cet album!
- Ecoute… Ton vieux va te caresser les côtelettes au manche de pioche s’il apprend ça, vrai?
- Pour sûr, m’sieur! La dernière fois j’ai pas pu venir en classe de trois jours.
- Si tu me le dis, je demanderai à ton maître d’écraser le coup et de ne rien dire à ton dabe…
- C’est vrai m’sieur?
- Parole!Dialogue entre San-Antonio et Léon