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Septembre 1936 - Janvier 1939
Mattéo



Fiche descriptive

Roman Graphique

Mattéo

Tome 5

Jean-Pierre Gibrat

Jean-Pierre Gibrat

Jean-Pierre Gibrat

Futuropolis

20 Novembre 2019


17€

9782754807463

Chroniques
Trosième époque (août 1936)
À l'échelle humaine
Quatrième Epoque (août-septembre 1936)
L’aventure espagnole
Septembre 1936 - Janvier 1939
Une petite musique mélancolique

Durant ces deux années de guerre civile, à Alcetria, Mattéo s’est installé chez don Figueras, le hobereau du village. Autoritaire et n’ayant pas la langue dans sa poche, le vieil homme est réduit à se mouvoir dans un fauteuil roulant, le rendant dépendant du bon vouloir de Mattéo ou de ses hommes.

Malgré le caractère trempé et les convictions nationalistes de don Figueras, Mattéo se prend à apprécier les discussions qu’il a avec lui. C’est Don Figueras qui va suggérer un étrange marché : échanger Amélie, prisonnière des franquistes, contre le curé de la paroisse…

Peu à peu, un dialogue s’installe, étonnant, improbable, et qui bientôt va déboucher sur une révélation à laquelle Mattéo était loin de s’attendre.La guerre s’intensifie, les fascistes s’approchent de plus en plus dangereusement du village. Les événements dès lors vont s’enchaîner, pour le meilleur, et surtout le pire…
un chef d'oeuvre!


Une petite musique mélancolique
Mattéo, planche du tome 5 © Futuropolis / GibratAmélie et Mermoza partis à bord de l’avion de ce dernier pour effectuer des relevés topographiques dans une zone où s’affrontaient phalanges franquistes et Républicains n’étaient pas rentrés de mission à la fin du quatrième volume de Mattéo et leur sort était resté en suspens tandis que le héros éponyme s’était installé chez le notable du village, Don Figueras.

Le cinquième tome nous apporte des réponses et, formant diptyque avec le précédent, conclut superbement l’épisode de la guerre civile espagnole en narrant les aventures de nos héros de septembre 1936 jusqu‘à la retirada de janvier 1939.


Depuis le début de la série, Jean-Pierre Gibrat alterne entre des tomes qui couvrent une longue période (14-18 pour le tome 1, la révolution bolchevique pour le 2 et la guerre espagnole pour le 5) et des moments beaucoup plus courts (15 jours en 1936 pour le tome 3 et quelques semaines pour le 4) et il profite de ces différents tempos pour installer les petites histoires des protagonistes dans la grande Histoire…

Mattéo, planche du tome 5 © Futuropolis / GibratCe tome 5 se déroulant dans un quasi huis-clos, le village d’Alcetria, a déjà des allures de conclusion. Sous le soleil plombant espagnol, les espoirs politiques se délitent, les personnages des premiers volumes se retrouvent pour mieux se perdre et c’est le tome des révélations sans happy end. Les relations s’étoffent et acquièrent une vraie densité. Pourtant, Gibrat n’a jamais été aussi peu disert que dans ce volume : il laisse place à toute l’expressivité de son dessin en nous proposant des doubles pages muettes et de nombreuses vignettes de visages en gros plan en champ contrechamp dans lesquelles les regards et les expressions extrêmement travaillés en disent beaucoup plus que de longs discours. Il fonctionne par litote en montrant par exemple la belle Amélie, ex-otage des phalangistes, préférer un Mauser à sa sacoche d’infirmière. L’auteur ne tombe jamais dans la grandiloquence ni dans le pathos. Soit il manie l’ironie (le sentimentalisme des retrouvailles entre Amélie et Matteo quand elle lui tombe dans les bras au moment de l’échange est immédiatement mis à mal par la scène quasi identique dans laquelle le curé abattu finit dans les bras du général) soit il pratique l’art de la retenue. Il use de l’ellipse et de la symbolique aussi comme dans ces grandes cases symétriques dans lesquelles Robert part à la conquête de Saragosse, la fleur au fusil, par une belle journée d’été pour revenir battu et dépité deux pages plus loin – et quelques mois plus tard- à Alcetria un soir d’hiver enneigé.

Mattéo, planche du tome 5 © Futuropolis / GibratDans cette œuvre très construite, le long monologue de Matteo comme la phrase gimmick d’Aneschka « là y a pas rien » acquièrent une valeur particulière, presque musicale : en devenant point d’orgue et variations. La légèreté initiale se mue en gravité. Petit à petit l’étau se resserre autour des héros : c’est la débâcle historique et la déroute des sentiments. On est loin du « pessimisme sifflotant » des premiers tomes et les confrontations acquièrent ici une grandeur tragique. Gibrat, au sommet de son art, ne semble rien laisser au hasard : le moindre détail est signifiant et ce qui apparaissait comme une digression s’avère finalement capital. On ne sera pas surpris d’apprendre qu’il a en tête le scénario du tome 6 - dont il a déjà écrit la dernière réplique - qui réorchestrera toute la petite musique mélancolique de la série.

« Matteo » est une somme et une œuvre rare dans la bande dessinée parfaitement orchestrée scénaristiquement et splendide graphiquement…déjà un classique dont on attend, avec une impatience mêlée de tristesse, le dénouement.

Cette cinquième (et avant-dernière) époque de « Matteo » est le tome des révélations : révélations sur le destin des personnages, sur leurs relations et même sur leur filiation. Si l’Histoire est toujours bien présente, la part belle est donnée aux descriptions psychologiques et à l’approfondissement des caractères. Les histoires sont touchantes et pudiques dans une narration poétique toute en retenue et d’amples cases muettes. L’ensemble est magistralement construit et dessiné. A lire et à relire…

Des vies émiettées, ficelées sur des charrettes et des cauchemars encore vibrants dans toutes les musettes. Tout un cortège trébuchant vers un avenir sans boussole. Chaque carrefour était un affluent. L’estuaire des misères : Barcelone. Nous portions tous l’uniforme invisible des vaincus. (Matteo, récitatif p. 56)

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