     Franck Sangaré travaille comme détective et s’il est venu à Saint-Elme ce n’est pas pour y suivre une cure thermale mais pour retrouver Arno Cavaliéri, fils de bonne famille disparu depuis près de trois mois… Ce faisant, il ignorait qu’il allait mettre les pieds dans un véritable nid de crotales… et de grenouilles…
Alors que la ville était sous la coupe réglé de Roland Sax, un riche industriel, ce dernier est assassiné sur ordre de l’oligarque Gregor Mazur, son propre beau-père qui n’a pas apprécié que ce dernier refuse de souscrire à son projet pour Saint-Elme. Venu assister son frère à la demande de Dombre, Philippe Sangaré le fait s’évader de l’hôpital où il était soigné après avoir échappé aux griffes d’un dangereux illuminés appelé le Derviche. Travaillant pour les Sax, ce dernier n’est autre que le fils Cavaliéri…
Le fantôme d’Hélène Mertens se révèle à Franck. Fort de ses confidences et aiguillés par « l’Œil vois-moi », les frères Sangaré et leurs acolytes font route vers le chalet où Paco et Romane hébergent la fillette sauvé par Félix Morba d’une innommable tuerie… Ils ignorent qu’ils sont sous la surveillance des hommes de mains de Gregor Mazur qui convergent vers le chalet où va se jouer l’ultime confrontation...
 Présenter le synopsis de cette série relève de la gageure tant le récit concocté par Serge Lehman s’avère tentaculaire et délicieusement alambiqué avec de multiples arcs narratifs qui vont, comme annoncé dans le quatrième opus, se télescoper pour un final dantesque…
Bien sûr, les tueurs du clan mafieux de Mazur semblent leur avoir un avantage déterminant sur les frères Sangaré et leurs hétéroclites acolytes, d’autant que le Derviche, même ébranlé, s’avère être un redoutable combattant, surtout après avoir absorbé des drogues de synthèses… Mais, à l’instar des 300 athéniens qui, dans le défilé des Thermopyles, tinrent un temps tête à plusieurs dizaines de milliers de soldats de l'Empire achéménide, ils sont prêts à vendre chèrement leur peau dans ce chalet transformé en Fort Alamo !
Et force est de reconnaître que la confrontation annoncée est à la hauteur de nos plus folles espérances…. Rarement fusillade n’aura été retranscrite de façon si hallucinante dans un album de bande-dessinée alors que chaque pièce du puzzle narratif apparaît comme étant parfaitement à sa place dans la trame imaginée par l’un des scénaristes les plus singuliers du neuvième art…
 Née avec leur saisissant Homme Gribouillé paru en 2018, la complicité entre Frederik Peeters et Serge Lehman apparait comme une évidence tant ce polar iconoclaste et décalé se marie à merveille avec le style du dessinateur et ses couleurs hypnotiques, hallucinées et hallucinantes. Passé la surprise du premier tome, elles font partie prenante de l’album, posant avec maestria des ambiances stupéfiantes qui entraînent le lecteur à la frontière du réel avec une confondante et désarmante facilité, nous faisant accepter sans coup férir les éléments fantastiques dont on ne sentait jusque-là que les frémissements… Petite merveille d’audace et de virtuosité, le découpage ciselé de l’album confère à l’ensemble une dimension très tarantinesque, avec des cadrages incisifs qui mettent le focus sur des détails en apparence insignifiants mais dont la présence contribue à poser cette atmosphère unique qui est l’un des très nombreux atouts de la série… Et si chacun des personnages, tous plus barrés les uns que les autres, s’avère fascinants, le Derviche et son regard fou évoquant celui du Raspoutine de Pratt, est sans doute l’un des plus dérangeants…
 Après leur Homme gribouillé, Serge Lehman et Frederik Peeters se retrouvent pour signer l’un des polars les plus fascinants et des plus hallucinanés de ces dix dernières années…
L’action se déroule dans une station thermale nichée au pied d’une montagne. Un détective y débarque pour retrouver un fils d bonne famille disparu il y a plusieurs semaines. La bourgade est tenue d’une main de fer par un riche industriel qui, pour avoir voulu prendre les distances avec son oligarque de beau-père va se faire assassiner sur ordre de ce dernier… Des trafics en tous genre, une fillette enlevée, une revenante, un Volkh, des grenouilles envahissantes, une galerie de personnages décalés et joyeusement barrés et quelque chose qui se réveille et s’apprête à frapper sont au menu de ce dernier opus dont le dernier acte sera aussi violent que sanglant.
Il y a une réelle osmose entre la fascinante construction scénaristique de Serge Lehman et le dessin singulier de Frederik Peeters, ses couleurs hypnotiques et sa mise en scène tarantinesque, avec notamment une scène de fusillade qui fera date… Ces deux auteurs au talent confondant mettent en scène une galerie de personnages iconoclastes et décalés alors que chaque pièce du puzzle narratif mis en place au cours des quatre tomes précédents viennent s’assembler de façon vertigineusement cohérente malgré des incursions dans le fantastique…
Porté par une atmosphère oppressante et singulière, Saint-Elme est d’ores et déjà un classique des polars du neuvième art, à ranger aux côtés de Blacksad, Criminal, Parker ou Tyler Cross…
Je le sens pas. Y’a comme un truc qui déconne.le Derviche
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