1977, au beau milieu d’une vaste étendue aride et désertique. Dans le pénitencier de Kairnes, Floyd Thorne attend dans le couloir de la mort qu’on exécute sa sentence…
Menottes aux poings, le colosse est encadré par deux matons lourdement armés. Un moment d’inattention lui suffit pour défoncer la gueule de l’un d’eux et passer le second par une porte vitrée avant d’étrangler avec ses chaînes un mécano qui passait par là et s’installer au volant de la Ford Torino de la pénitentiaire avec laquelle il allait défoncer la grille sous le feu nourrit des gardiens de la prison…
Commence une folle cavale violente et sanglante parsemée de cadavres et qui semble le conduire vers la ville de Camooda…
Publié en décembre 2021,
La ballade d'un homme violent fut un roman avant d’être transposé en bande-dessinée par son auteur, Denis Van P. Bien que travaillant dans la finance, l’homme est un passionné de littérature et de cinéma et cela se ressent dans l’impact de ses récitatifs et la nervosité de sa mise en scène…
Le récit en lui-même a quelque chose de très tarantinesque tant par la violence outrancière qui baigne le récit, que par les séquences totalement barrées ou dans sa construction narrative qui mêlent deux temporalités différentes pour former un tout dont la cohérence n’apparait qu’à la toute fin de l’album… Le premier est centré sur la cavale qui s’amorce dès la première séquence… Mais le récit truffé de flashback qui nous entraîne dans l’enfance de ce salopard violent et amoral qui tue sans états d’âme ceux qui ont l’outrecuidance de se trouver sur sa route… Une enfance malheureuse marquée par l’abandon d’une mère et la violence d’un père qui rend son gamin responsable de son départ et le lui fait chèrement payer, à coup de trique…
Et si on déteste ce prisonnier en cavale qui laisse des cadavres sanguinolents dans son sillage, on souffre pour ce gamin maltraité par son père… Et l’on comprend comment, grandissant sans amour dans ce climat de violence quotidienne, ce pauvre gosse est devenu la brute abjecte qu’on voit à l’œuvre au fil des page, cruel et si froidement indifférent aux souffrances des autres… On pressent que ces deux trames narratives vont se télescoper pour un final qu’on devine d’ores et déjà xplosif t sanglant… Mais l’auteur réussit le tour de force à mêler le Floyd Thorne enfant et adulte, rendant le final particulièrement poignant et donnant du sens à sa cavale tragiquement désespérée.
Dialogues et récitatifs sont percutants et décalés à souhait, introduisant une bonne dose de cynisme et d’humour grinçant dans ce récit rugueux et oppressant, dans un esprit toujours très tarantinesque… Pourquoi « ballade » et non « balade » ? Sans doute parce que ce récit implacable est accompagné par le vrombissement des moteurs et le crissement des pneus, rythmé par le bruit des détonations, le râles des victimes agonisantes et le bruit des os et des cartilages qui se brisent avec les rêves d’une vie heureuse et paisible qui n’ont pas leur place ici…
Le dessin vif et cinglant est en parfaite osmose avec le récit. Les visages taillés à la serpe campent des personnages hauts en couleur et l’encrage énergique parvient à conserver toute la puissance et la spontanéité des crayonnés… Mais ce qui fascine le plus, ce sont les cadrages incroyablement cinématographiques et dans lesquels on ressent tout l’amour de l’auteur pour le septième art en général et pour les films policiers en particulier. En grand connaisseur, Denis Van P joue avec les codes d’un genre très codifié, n’usant de la couleur que pour éclabousser ses planches du sang des victimes de Thorne…
Onze ans après son Joseph Carey Merrick, Denis Van P revient à la BD pour signer un polar âpre et violent, adaptation de son roman éponyme.
1977, Pénitencier de Kairnes. Condamné à mort, Floyd Thorne se débarrasse de ses gardiens avant d’étrangler un mécano et de s’enfuir à bord d’une Ford Torino sous les tirs nourris des gardiens… Commence alors une balade sanglante avec en ligne de mire la ville de Camooda…
Passionné de cinéma, l’auteur nous entraîne dans un road-movie très tarantinesque à la suite d’un véritable salopard san foi ni loi qui, n’ayant plus rien à perdre, se fiche bien se semer les cadavres sur sa route… Porté par des récitatifs percutants qui inscrivent l’album dans une veine littéraire et des dialogues cyniques et mordants, passé et présent se mêlent dans ce récit implacable mis en scène avec une efficacité toute cinématographique… Parfaitement raccord avec l’ambiance oppressante du récit, l’encrage nerveux de l’artiste conserve l’énergie et la spontanéité de ses crayonnés, la couleur venant éclabousser les planches du sang des victimes…
La Ballade du homme violent est un polar suffocant nerveux et solidement charpenté qui ravira les amateurs de films (très) noirs…
Mucus, si je sens le moindre tressaillement suspect, le coup part et notre ami Foster mesure dix centimètres de moins, Ok ?Floyd Thorne