États-Unis, 1865. Fuyant la prison sudiste de Richemond à bord d’un ballon, l’ingénieur Cyrus Smith, le reporter Gédéon Spilett, l’ancien esclave affranchi Nab, le marin Pencroff, le jeune orphelin Harbert et Top, le chien de Cyrus survolent un océan Pacifique déchaîné avant d’abîmer en mer et d’être rejetés sur une île…

Après avoir amorcé l’exploration de l’île, qu’ils baptisent du nom de Lincoln, et retrouvé miraculeusement saint et sauf Cyrus Smith que tous, sauf Spilett, pensaient mort, nos explorateurs vont découvrir une île luxuriante où ils vont organiser leur micro-société. Ils vont aller de découvertes en découvertes, sauvant même un naufragé d’une île voisine…

Leur petite communauté va devoir affronter bien des épreuves, du débarquement de pirates en passant par la maladie… et à chaque fois, ils semblent tirés d’affaire par la main invisible et salutaire du destin, comme si quelqu’un, dans l’ombre, leur venait en aide…

Après Deux ans de vacances réalisé avec Philippe Chanoinat et Hamo et Un capitaine de quinze ans (déjà dessiné par Christophe Picaud), Frédéric Brrémaud nous entraîne une fois encore dans l’univers de Jules Verne avec l’Île Mytérieuse, classique des romans d’aventure qui marque le retour d’un des plus fascinants personnages d’un des maîtres de l’aventure et de la science-fiction ainsi qu’un autre, moins célèbre, tout droit sorti pour sa part des Enfants du Capitaine Grant.…

On est d’abord séduit par la couverture singulière qui évoque les anciennes éditions de Jules Verne, reprenant la couleur rouge et les dorures des éditions Hetzel, venant par la même renforcer le lien entre l’album et le roman dont il est tiré. Condenser un roman de plus de huit cent pages en un seul volume de 64 pages est un challenge dont Frédéric Brrémaud se sort avec brio. Il parvient à ne retenir que l’essentiel de cette histoire dense et foisonnante sans lui faire perdre son efficacité narrative. Le contexte de la Guerre de Sécession est posé avec art en quelques pages, de même que les caractères des différents protagonistes.

On retrouve dans ce récit cette filiation avec le Robinson Crusoé de Defoe avec ces naufragés sur une île qu’on suppose déserte, puisque les animaux y vivant ne semblent pas craindre l’homme. Mais les naufragés ont la connaissance des découvertes nouvelles ou de la botanique qui vont leur permettre de s’organiser. Le savoir est ainsi l’arme principal des naufragés, le personnage de Cyrius Smith abordant les problèmes avec sa rationalité toute scientifique, créant fours à poterie, forge et même nitroglycérine ou pyroxyle… C’est pourtant la nature, indomptable, qui aura raison de leur petite communauté avec cette éruption qui fera disparaître l’île dans les flots… non sans que l’histoire ne nous révèle l’identité de cette présence étrange et protectrice que tout un chacun pouvait sentir… Petite entorse au récit originel, le personnage de Harbert Brown se féminise, permettant aux lectrices de se projeter dans ce récit somme toute très masculin, bin que Verne a créé de grande figures féminines dans d’autre de ses romans… Le récit n’a rien perdu de sa force et la révélation finale, ne tenant qu’en peu de pages, n’a rien perdu de son efficacité et de son impact narratif !

En plus d’être rafraîchissant, le style de Christophe Picaud colle ma foi fort bien à ce récit d’aventure, posant avec art les différents décors de l’histoire et y faisant évoluer des personnages particulièrement convaincants.

Après leur adaptation d’un Capitaine de Quinze ans, Frédéric Brrémaud et Christophe Picaud se retrouvent pour signer celle d’Île Mystérieuse qui voit le retour d’un des plus fascinants personnages des récits d’aventure du XIXe siècle, j’ai nommé le Capitaine Nemo.

Pour s’échapper de leur prison de Richemond, l’ingénieur Cyrus Smith, le reporter Gédéon Spilett, l’ancien esclave affranchi Nab, le marin Pencroff, le jeune orphelin Harbert volent un ballon qui dérive au-dessus de l’océan Pacifique avant de s’échouer en mer. Les naufragés parviennent à gagner une île hospitalière dominée par un volcan. Grâce aux compétences de chacun et aux connaissances de Smith, ils vont organiser l’île en micro-société…Au fils de semaines, ils sentent une présence bienveillante qui les aide à surmonter l’adversité…

Le dessin élégant de Christophe Picaud pose un décor convaincant et met en scène des personnages unis par une amitié à toute épreuve née dans l’adversité. On retrouve dans cette adaptation signée Frédéric Brrémaud la trame du récit originel malgré les inévitables coupes pour faire rentrer dans un album de 64 pages les quelques huit cent pages du roman. On aborde aussi dans ce récit le thème si cher à Jules Verne : le rapport entre l’homme et la nature et si le roman s’inspire du Robinson Crusoé, nos naufragés l’affrontent fort du savoir scientifique qui leur donne un atout de taille pour la domestiquer… Mais la nature, en définitive, aura, comme on le sait, le dernier mot… Cette Île Mystérieuse est une sympathique adaptation d’un classique du roman d’aventure qui pourrait donner envie aux jeunes générations de découvrir l’œuvre de Jules Verne…

On sent chez lui un homme de science avisé qui qui ne se considère pas comme un colon, mais comme un naufragé.Bonadventure Pencroff