Après « Les Rivières Pourpres », voici donc la deuxième adaptation directe d’un roman de l’écrivain Jean-Christophe Grangé ; « Les Rivières Pourpres 2 » ne s’étant pas écoulées de sa plume malgré la requête des producteurs et du réalisateur.
On y retrouve Jean Reno, désormais habitué à incarner les personnages de l’auteur. Pour autant, et même si je trouve Reno brillant, ce n’est à mon avis pas son meilleur rôle. Il y a quelque chose qui ne prend pas aussi bien que pour le « Commissaire Niemans ». La difficulté de jouer un ex-ripou peroxydé plus turc que français ? Ou peut-être est-ce l’action, omniprésente et soudaine, qui ne laisse que peu de place à Reno pour déployer la pleine mesure de son talent. Cela dit, n’allez pas croire que l’acteur est mauvais, ce n’est pas ce que je voulais dire. Pour le reste, tout le monde a du talent, depuis Jocelyn Quivrin qui trouve là un rôle à sa hauteur…jusqu’à Arly Jover, une femme qui cache bien plus qu’elle ne pourrait le croire dans les brumes de son passé. Laura Morante, la psy qui aidera l’héroïne, est d’une sensualité toute latine
à laquelle je ne pouvais que rendre hommage (mais aller plutôt la voir dans « La Chambre du Fils » de Nanni Moretti)…
Comme toujours avec Grangé, le tout a un défaut que ne peut faire qu’amplifier le cinéma : c’est un peu « too much ». Les méchants comme les gentils ont parfois des pouvoirs de super-héros qui les rendent vraiment hors du commun ; et les lieux traversés, glauques et gothiques, font que l’Empire des Loups nous emmène dans une sorte de Paris alternatif que ni vous ni moi n’auront l’occasion de visiter.
Malgré cela, le film reste un divertissement original qui a la qualité de son défaut : il vous plonge dans un autre monde où la lumière n’a que peu de place. C’est une immersion qui se veut totale, que vous y soyez hermétique ou non. S’ensuivront d’horribles tortures, des personnages originaux et un voyage en Cappadoce. Profitez, c’est un des plus beaux lieux du monde. L’intrigue qui nous y conduit est prenante, enchevêtrée et tourbillonnante. Je ne pourrais pas vous dire quelles sont les libertés prises avec le livre puisque je n’ai pas lu celui-ci (après m’être enfilé tous les premiers, je fais une pause). A priori, pour ce que l’on m’en a dit, le fin est sans doute plus hollywoodienne… Il est à noter que le tout s’appuie sur une réalité politique qui dénonce les dérives néofascistes turques (mais bon, ne vous inquiétez pas, on a les nôtres aussi
). Pour la petite histoire, l’homme qui tenta d’assassiner Jean-Paul II au début de son pontificat était apparemment issu des « Loups Gris »…
La réalisation de Chris Nahon (« Le Baiser Mortel du Dragon » avec Jet Li) est assez talentueuse, tantôt douce et caressante et tantôt limite épileptique. Quelques plans aériens pour la beauté du geste, et des scènes d’action embrouillées pour le réalisme. C’est assez audacieux (je pèse mes mots, je ne suis pas plus qu’un cinéphile), peut-être un peu « fashion », mais cela colle bien au script.
Bref, nous avons là un film qui n’apportera pas forcément sa contribution dans le débat sur l’entrée de la Turquie dans l’Europe, mais qui ravira les amoureux des thrillers glauques et vitaminés.